Benjamin Oppert - Auteur de "Les Tentations Electives" et "Entre Père et Maire"

Publié le par L'Autre interview

 


AFFICHELa Pièce « Les Tentations Electives », à l’affiche depuis décembre 2008, est programmée au Théâtre du Funambule Montmartre, 53, rue des Saules – PARIS 18ème –.

Métro : Lamarck-Caulaincourt - depuis le 19 septembre et jusqu’au 6 décembre 2009 – Le Samedi à 18 h et le Dimanche à 19 h 30

Infos et réservations : 01 42 23 88 83 – Plus d’infos sur le BLOG de l’auteur : http://benjamin-oppert.blogspirit.com/

 


 

Du parler.

Lors de la réalisation de cette interview, il m'est apparu distinctement que j'avais bien à faire à un auteur. La parole de Benjamin Oppert est précise et semble se poser naturellement sur ma feuille comme appartenant plus à l'expression écrite qu'à celle de l'oral. Benjamin est un homme aux mots étudiés. C'est un plaisir.

 

De l'écrire.

A considérer les deux pièces de Benjamin Oppert, écrite entre ses 25 et 30 ans, cette vocation d'auteur peut apparaître comme un nouvel élan dans sa vie, en parallèle de sa carrière professionnelle...C'est à mon sens se méprendre.

Un métier le jour et l'auteur de théâtre la nuit...certes !

Mais, je pense, et c'est mieux comprendre Benjamin Oppert, de penser que cet élan qui le motive vient des profondeurs de sa personnalité, de la maturité de l'homme trentenaire aboutissant à la fécondité intellectuelle de ses expériences et de ses réflexions.

 

De l'homme.

La joie d'être auteur pour Benjamin procède certainement du plaisir de tremper sa plume dans une encre dont la qualité s'est faite dans l'épreuve du temps. Encre bonifiée par une pratique de l'écriture fidèle, composé aussi du bonheur d'avoir connu le milieu du théâtre dès le berceau, poivrée d'une façon de transcender les difficultés et pimenté de vouloir en découdre pourquoi pas avec les trahisons de ses contemporains.

Ainsi, Benjamin Oppert confère à sa plume l'occasion de rejoindre ses ancêtres, mais quant à lui, d'utiliser la plume et non l'épée, pour éclairer certaines comédies de la vie, et dénoncer les coups de sabots de différents coquins.

 

Auteur vif ? Certainement, et remarqué, puisqu'il fût invité comme jeune auteur à la Garden Party de l'Élysée.

 


Benjamin Oppert, quel a été le parcours qui vous a conduit à écrire des pièces de théâtre ?

 

Enfant, j'écrivais beaucoup de nouvelles. J'ai commencé par écrire des histoires très rouges et très noires, des histoires de massacres familiaux dans des époques révolues. Le XVIIIème m'a beaucoup inspiré quand j'étais gosse, parce que j'ai longtemps pensé que notre époque actuelle et la société d'aujourd'hui étaient stériles pour l'inspiration.

Je me suis donc longtemps transposé dans d'autres siècles. Ensuite, j'ai eu une période où je n'ai pas du tout écrit mais je sentais que ça murissait en moi. Aujourd’hui, l’écriture est une nécessité et j’aimerais avoir plus de temps pour m’y consacrer. Quand je passe à autre chose, je sens le manque me ronger et le besoin revient au galop. L’essentiel du moment devient alors secondaire durablement. J’aime tracer des courbes d’écriture, autant de formes excitantes que je malaxe à ma guise.

Mon premier ouvrage conséquent a consisté à faire un bilan de ce que j'avais vécu jusqu'à mes vingt cinq ans. Parce que je voulais me poser, voir où j'en étais, préciser ce que j'avais envie de faire et où je voulais aller. On m’a souvent reproché de ne pas assez parler de moi. Alors j’ai exprimé beaucoup de moi-même par écrit. Ce qui est ressorti de ma réflexion, c'est que j'avais vraiment envie de me rendre utile, de témoigner et de partager sur ce que j'avais vécu, sur ce que j'étais en train de vivre et sur ce que j'allais vivre.

J'avais envie de me mettre en perspective d'une certaine façon. C'est à dire de faire des choses dans la perspective de les raconter ensuite. Et ça c'est un véritable moteur.

 

Le bonheur de se dire selon une certaine démarche pédagogique ?

Oui. Ce n'est pas une question de vanité, mais bien le contraire : une envie de partage. Par exemple, dans ma première pièce "Entre père et maire" qui est plutôt une comédie mais qui aborde aussi des sujets sérieux comme le harcèlement moral, beaucoup de spectateurs se sont reconnus dans le personnage principal, Alexandre, qui revient systématiquement dans tous mes ouvrages. Il est en quelque sorte mon double littéraire et pourtant énormément de personnes se retrouvent en lui. C'est ça qui est très amusant et très intéressant, c'est que je pars d'une expérience personnelle et qu'à l'arrivée les gens se reconnaissent dans ce personnage.

 

PhotoC'est cela la force artistique de l'écriture ?

Oui, complètement. C'est la capacité de transformer un évènement personnel pour en faire quelque chose de partagé par le plus grand nombre. Quelque chose de très intime devient du partage.

 

Quel âge avez-vous ?

Trente ans et tous les jours je fais le bilan :

- « Est-ce que tu en a fais assez ? »

- « Est-ce que tu vas avoir des regrets ? »

 

Mon but est de faire le maximum de choses tout en recherchant la qualité. J'ai vraiment envie de remplir ma vie.

 

Lors du bilan de vos vingt-cinq ans, quelle était votre situation professionnelle ?

Je venais de vivre mon expérience de chef de cabinet d'un maire de la région parisienne. J'avais vécu l'expérience de la vie politique et j'avais envie de la raconter. Ca a été l'objet de ma première pièce. Ce que j'avais envie d’écrire, c'était fait pour être dit, mis en scène et mis en situation. La forme théâtrale s'est imposée d'elle-même. Il n'y avait que le théâtre pour rendre viable ce que j'avais envie de dire sur le moment.

 

Qu'est-ce que vous aviez au fond de vous à dire pour en faire le sujet de cette première pièce ?

D’une part, j’avais envie de parler de la difficile relation entre les introvertis et lesaffiche_entre extravertis. D’autre part, j'avais envie de mettre en scène la vie d'une mairie avec tout ce que cela comporte de situations humoristiques. J’ai pu mêler ces deux sujets en créant le personnage du maire, sur le devant de la scène, et son collaborateur, l’homme de l’ombre…

Quand on est chef de cabinet d'un maire, on reçoit énormément de personnes, souvent à la place du maire. Il y a des cas vraiment désespérés, qu'il faut régler avec beaucoup de sérieux, le mieux possible, dans la limite de nos compétences et de nos possibilités, parce que le maire n'est pas compétent pour tout, malgré ce qu'on croit.

Et en même temps on rencontre des gens complètements farfelus qui considèrent le maire comme le commandeur. Ils font un transfert sur l'image du maire, l'élu de proximité. Il y a tout un fantasme qui se calque sur ce personnage parce qu'il est l'image symbolique du premier magistrat de la ville.

 

C'est ce que vous avez vécu, compris et eu plaisir à retranscrire par votre plume ?

J'ai écrit la pièce en trois mois d'août à octobre 2007. Je l'ai présentée au Théâtre du Nord-Ouest en décembre. En janvier, le Directeur m'a appelé en me disant qu'il voulait la programmer pour avril. Donc ça c'est fait très vite.

Quand je me suis aperçu que la pièce intéressait plusieurs metteurs en scène et que j'avais la possibilité d’en choisir un, là je me suis dit : "On a matière à faire quelque chose de bien". J'étais un jeune auteur inconnu, c'était ma première pièce. Pouvoir choisir et participer aux auditions, 01c’était une vraie chance.

 

Sur quels critères avez-vous choisi le metteur en scène ?

J'ai demandé à chaque metteur en scène la façon dont il percevait la pièce et la façon dont il comptait la monter. En fonction de ce qu'ils m'ont dit, j'ai choisi.

 

Comment s'est passé le casting des comédiens ?

La pièce n'avait jamais été interprétée ni même lue jusque là. Le premier jour des auditions, j'avais dix minutes de retard et du hall du théâtre j'entendais des paroles qui m’étaient familières. C'était la première fois que j'entendais ma pièce interprétée par des comédiens professionnels et c'est vrai que ça a été une grande émotion...une très grande émotion. Ça m'a fait vraiment quelque chose. C'est un souvenir qui restera inoubliable.

 

Et ensuite, est-ce que vous avez eu votre avis à donner sur le choix des comédiens ? Combien y-a-t-il de rôles ?

Dans "Entre Père et Maire" il y a six personnages mais il y Les_Tentations_Electives_photo_de_la_troupeavait cinq comédiens par ce qu'il y en a un qui jouait deux rôles. On a choisi certains comédiens ensemble. Après, pour "Les tentations électives", ma deuxième pièce, même si j'ai collaboré avec le metteur en scène, je l’ai laissé libre de créer mais j'ai toujours donné mon avis quand j’ai trouvé utile de le donner.

 

Combien de temps a duré la mise en scène ?

Ça c'est monté assez vite. Pour « Entre Père et Maire », on a plus passé de temps pour les auditions que pour les répétitions.

 

C'est à dire ?

La pièce a été montée en un mois alors que le casting avait duré un mois et demi. On avait passé une annonce dans la pièce spécialisée et on a reçu cinq cents candidatures.

 

Une certaine familiarité s'est-elle installée avec les comédiens et le metteur en scène, ou alors, vous avez entretenu une certaine discrétion ?

Il y a une très bonne ambiance dans la troupe des « Tentations Électives ». C'est très important. La preuve, c’est que ça fait maintenant 10 mois que notre spectacle est joué et qu’on est toujours aussi content de se retrouver ! On y croit tous beaucoup à ce spectacle. En plus de la programmation par deux théâtres parisiens, la Mairie de Bourg la Reine dans les Hauts de Seine a programmé dans le cadre de son grand Festival de Théâtre à la fois "Entre père et maire" et "Les Tentations Électives". Il y a eu une soirée spéciale consacrée à mes pièces. Plusieurs autres Mairies sont intéressées pour programmer les Tentations.

 02

Qu'avez-vous ressenti à la première de "Entre père et maire"?

Ma pièce n'était pas encore jouée et "Le Parisien" m'avait déjà interviewé avant la première. J'étais glissé dans le public et c'est vrai que, quand j'ai entendu les premières réactions, cela m’a fait une sensation très particulière. Là, il y a une véritable interactivité avec le public et on se rend compte de l'impact que peut avoir le texte et les situations, au-delà du jeu des comédiens.

 

Combien de temps a été jouée "Entre père et maire"?

Elle a été jouée trois mois à Paris puis en Normandie et dans les Hauts de Seine.

 

Vous faites des dédicaces du texte de la pièce. Quel est l'accueil du public ?

Ma première séance de dédicaces, c’était au festival de théâtre de Bourg-la-Reine en mars 2009. Elle a eu lieu juste après la représentation de « Entre Père et Maire ». C'était un grand moment. Première pièce, première participation à un festival, première séance de signature…

Après, j'ai participé à une séance de dédicaces au salon du Théâtre, Place Saint-Sulpice à Paris. Ensuite j’ai été invité par une librairie en Bourgogne qui a organisé des séances de rencontres autour de mes Pièces.

 

Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire votre deuxième pièce "Les tentations électives". Vous n'aviez pas tout dit la première fois ?

Il parait que les jeunes auteurs sont très bavards dans leur première pièce. C'est vrai qu'on a envie de dire beaucoup de choses mais pourtant je n’avais pas tout dit sur la politique. J'ai eu aussi envie de parler de mon aventure théâtrale. C’est un des sujets des "Tentations électives" à travers une soirée originale des Molières.

J'ai écrit la pièce en un mois au moment où ma première pièce marchait bien. Je suis parti de la question :"Cette première pièce qui marche, est-ce que c'est un coup de chance ?". J'avais envie de confirmer, de me prouver que j'étais capable d'écrire une deuxième pièce. Donc d'arriver au terme d'un deuxième projet d'écriture.03

J'ai écrit cette pièce plus rapidement car j'avais assimilé la technique d'écriture théâtrale. Pour "Entre père et maire", il m'avait fallu apprendre à camper des personnages, amener l’intrigue, créer des situations. Surtout les situations comiques car c'est ce qu'il y a de plus dur à écrire. Il faut vraiment que ça soit très bien huilé. C’est un véritable mécanisme, bien particulier.

J'ai vu beaucoup de pièces, surtout en DVD, souvent plusieurs fois les mêmes, pour bien assimiler la technique. Pour le style et l’allure générale, j'avais envie de mêler, dans mes pièces, humour et une certaine profondeur.

 

Qu'avez-vous décelé de cette technique d'écriture de pièces ?

Je ne sais pas si c'est bien de le révéler, mais en tout cas, je veux bien raconter comment me vient l'inspiration. J'ai l'habitude de cogiter pendant un certain moment...de laisser venir la maturation. J'ai une première idée qui vient, une deuxième, la deuxième en amène une troisième et ainsi de suite. C'est comme une roue qui se met en marche. Je laisse la création s'agglutiner dans mon esprit et quand j'arrive à trois/quatre idées, là j'ouvre la porte et je laisse déferler l'écriture.

Ce qui est amusant, c'est que c’est en marchant que l'inspiration me vient. Plus je marche vite, plus les idées s'enchainent. Comme si la gymnastique intellectuelle succédait à la gymnastique physique. J'utilise beaucoup mon dictaphone. Parfois j'ai des idées en pleine nuit, donc plutôt que de me lever pour noter ce qui vient de surgir, je le confie à mon dictaphone. Je prends aussi des notes que je consigne dans un cahier. Mes meilleurs écrits sont mes pensées du moment. Je puise dedans ce qui peux me servir par la suite (sourire) C'est aussi en me rasant que les idées me viennent. Couper le poil et les idées surgissent. Il y a des moments, comme ça, où l'on fait quelque chose, tout en pensant à autre chose et c'est comme ça que cela me vient.

 

Parlez nous du parcours des Tentations Electives…

La Pièce « Les Tentations Électives » a été montée moins de six mois après ma première, au Théâtre du Nord-Ouest. Puis on a eu deux autres propositions de théâtres parisiens pour reprendre la pièce et on a choisi le Théâtre du Funambule Montmartre qui l’a programmée du 19 septembre au 6 décembre 2009. Elle a été jouée aussi, comme je vous l’ai dit, dans le cadre d’un Festival de Théâtre dans les Hauts de Seine. Plusieurs Mairies sont intéressées également pour la programmer.

 

 

Interview croisée : Benjamin Oppert, auteur et fils, Rémy Oppert personnage principal dans sa Pièce et père. Comment vivez-vous cette complicité artistique ?

Rémy : Ça nous a sans doute rapprochés. Il a vécu sa jeunesse dans cette ambiance théâtrale…

Benjamin : Mes parents se sont rencontrés au cours Simon, dans un cours de théâtre.

Rémy : Nous avons eu l'occasion de parler de cette pièce, des projets qu'on a avec. Il y a eu la période précédente, où il a fallu la monter, trouver des comédiens...

Benjamin : C'était intéressant d'avoir son père comme personnage principal de la pièce. C'est vrai que c'était une façon de nous rapprocher, de parler un langage commun qui est celui du théâtre. Ça nous a permis de travailler ensemble, même si ça n'a pas toujours été facile. Il y a eut des moments où l'on s'est parfois engueulé...sur des détails... Ce n'est pas toujours évident de travailler avec quelqu'un de sa famille et qui plus est son père.

 

Benjamin, comment arrivez-vous à cheviller votre travail et le théâtre ?

Les journées sont bien remplies. Dans la journée, je travaille à temps plein dans le secteur médico-social au service des personnes handicapées mentales. A partir de 20h commence la promo pour le théâtre plus l'écriture de discours pour des personnalités et des élus. C'est à peu près pareil le week-end puisque les « Tentations Électives » sont jouées le samedi et le dimanche. Il n'y a pas beaucoup de temps pour souffler, mais c'est motivant tout cela. On se dépense beaucoup pour que ça marche bien.

 

A quelle heure vous couchez-vous ?

J'essaye de ne pas me coucher trop tard : 23h30. Pour être en forme le lendemain et attaquer une nouvelle journée intensive. C'est un mode de vie. Mais ça permet d'avoir un équilibre entre un travail très concret, très pragmatique et le soir, où je me laisse aller à imaginer des choses qui même si elles sont en rapport avec la réalité, me permettent de m'évader.

 

De quoi s'agit-il exactement votre engagement pour les personnes handicapées ?

Ça consiste à animer des réseaux régionaux de présidents et de directeurs généraux d’associations et d'établissements. Les aider à gérer leurs établissements, les aider dans leurs relations avec les pouvoirs publics. J’ai à peu près un déplacement en région par semaine. Je reviens de Bourgogne. Je m’apprête à aller en Lorraine puis à Aubagne. Être au contact des personnes handicapées est, humainement, très enrichissant...

 

 

 

 

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